jeudi 26 mars 2020

Jour 14

Expédition à Shawinigan. Pas très matinale ces temps-ci, je me mets en marche tranquillement. C'est le premier jour que je m'habille avec du vrai linge depuis le 12 mars. Ça fait bizarre. Je mets un manteau propre, une écharpe propre, des gants propres. Je change même de sacoche. Pas question de contaminer toutes les personnes que je verrai pas. Pour ceux qui sont jamais allés à Shawi, c'est à peu près à 160 km de Montréal. Vous pouvez pas vous tromper parce que la ville est vraiment très très bien indiquée.


Les gens qui me connaissent savent que je suis rarement plus heureuse qu'au volant de mon char. C'est donc ben contente que je mets le cap sur Shawi en écoutant de la musique. Je fais un petit stop à Berthierville pour m'acheter un cappuccino glacé, ce qui fait augmenter mon indice de bonheur pis mon niveau de caféine.

J'arrive assez rapidement à Shawinigan. Faut dire que je suis jamais sortie de Montréal aussi vite. Y'a pas âme qui vive sur l'autoroute. Mon père vit en résidence depuis décembre. Ça été toute une histoire ste déménagement-là, tellement qu'on se demandait de quoi on parlerait quand ça serait enfin fini. Donc, il habite au Château Bellevue, au septième étage mais là-bas, ils appellent ça le sixième + un parce qu'y savent pas compter les étages. Bref, c'est là qu'y vit. Yé pas dans la misère.


Je sais déjà que je pourrai pas le voir. Les étrangers ont plus le droit d'entrer pis les résidents ont pas le droit de parler au monde dehors. J'ai reçu mes consignes. Y faut que je me parke à la réception pis que je laisse les courses sur une table dans le SAS entre les portes coulissantes de dehors pis celles de l'intérieur. J'appelle quand même mon père pour y dire que je suis arrivée, histoire que personne y vole sa bagatelle. J'ai pas le temps de sonner que le gardien de sécurité arrive à côté de mon auto avec un petit chariot pour prendre les courses. Ma bagatelle passe pas inaperçue. Le gardien me demande si je suis mariée. "Deux fois plutôt qu'une mon cher, je te le dis tout de suite, ton chien est mort !"

Le gardien repart vers l'intérieur pis quand tous les kits de portes s'ouvrent, j'aperçois mon père debout à la réception, comme un prisonnier, le sourire fendu jusqu'aux oreilles avec son jean pis sa petite chemise. Je pense que j'ai jamais été aussi contente de le voir pis surtout de constater qu'il a bonne mine dans les circonstances. On se crie bord en bord des portes avec le gardien qui essaie de nous les maintenir ouvertes, deboute dans le SAS. Ma joie est de courte durée. La madame de la réception trouve qu'y fait frette dans le courant d'air. Fermeture des portes. Le party est fini. Yé trois heures on ferme...

Je reprends la direction de Montréal avec le projet de revenir par la vieille route le long de l'eau. C'est plus beau pis ça va étirer le temps. Juste un problème : je commence à avoir envie de pipi. Avec le chargement de l'auto, mon arrêt à Berthier, le déchargement de mes courses, ça fait déjà un bon bout de temps que je suis dans le chemin. Faque là, j'ai envie... mais où fait-on pipi quand tout est fermé pis qu'un virus nous traque ? Sûrement pas dans une toilette sale de dépanneur. Je texte mon frère, évidemment. Tout le monde est en télé-travail à sa job. Je peux peut-être rentrer là sans trop de risques.

Mon frère travaille à Trois-Rivières. C'est à 20-25 minutes de Shawi, en direction de Montréal. Y me dit de le prévenir quand je serai dans le parking. Arrivée là bas, y sort dehors. On jase un peu en gardant nos distances. Je le suis à l'intérieur en le suivant d'un bon trois mètres. Moi, je suis les recommandations de Legault à la lettre : "On approche personne à moins de deux mètres tant qu'on a pas Legault d'Horacio !" 😁 On rejase deux-trois minutes dehors tout en maintenant la distance sécuritaire.

Je reviens à Montréal en passant par la 138. Il est 18h. quand je retrouve mon chat pis mon divan. Je mange de la pizza congelée pour faire changement. Ces temps-ci, je suis pas assez fatiguée pis je dors mal. Je décide de prendre un Ativan périmé avant de me coucher, question de pas passer la nuit à tournailler.

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